Motocyclettes Austral
...et aussi les tricars, les bicyclettes, la Nautilette...

Le Châssis - Cadre


Le Tri-Balladeur d'Albert Jean était déjà un véritable tricar, c'est-à-dire un véhicule à part entière, non pas une moto transformée en tricar au moyen d'un avant-train détachable. Son "ossature" est composée d'un cadre de moto renforcé qui est solidaire d'un avant-train dont la direction est articulée et commandée par un guidon ("système A. Jean"). Il en résulte un engin maniable dont le "châssis-cadre" – composé d'un châssis dans le plan horizontal et d'un cadre dans le plan vertical –  est plus solide que le cadre d'une moto munie a posteriori d'un avant-train.
 
Les types A et B
 
Le 29 octobre 1904, la Société Éd. Cheilus et Cie. dépose le brevet d'un nouveau châssis-cadre en tubes d'acier (Nº 347.543, vous en trouvez le texte intégral ici) qui apporte trois améliorations importantes:
Il permet
1. l'application de n'importe quel type de moteur,
2. le remplacement de l'un quelconque des éléments en cas d'avaries, sans nécessiter le démontage des autres et
3. de transformer instantanément le tricar touriste en tricar porteur en substituant l'avant-train par un autre.
À ces fins, beaucoup d'éléments du cadre sont  boulonnés au lieu d'être assemblés par brasure des tubes manchonnés dans des raccords en fonte malléable, le processus habituel à l'époque. Quoique très léger et rigide, un châssis-cadre en tubes d'acier a comme principal inconvénient les nombreuses brasures qu'il nécessite, lesquelles se décollent par les trépidations d'un long usage. Réduire le nombre des brasures n'est donc pas une mauvaise idée, à condition que le client resserre assez souvent les boulons.
Voici les trois éléments principaux composant le châssis:
 
les trois éléments principales du châssis d'un tricar Austral type A ou B
Les trois pièces composant les châssis d'un tricar Austral type A ou B, montées et prêtes à recevoir le groupe moteur 

Le châssis-cadre entier selon le brevet:
 
dessin châssis - cadre brevet Austral tricar type A
 
L'aspect de la partie arrière du cadre reste plus ou moins inchangé par rapport au Tri-Balladeur, même le pédalier sera conservé pour l'instant (Types A, B petit modèle; sur les autres modèles, le logement du pédalier dans le cadre servira à la fixation des marchepieds). Toutefois, la barre inférieure du cadre  - le support d'arrière du châssis (C, en haut et 8, fig. 1; coupe transversale fig. 4)- est désormais détachable, étant boulonnée au tube central (10). Ce support reçoit la fourche arrière dont les deux branches (11) sont reliés par deux tubes latéraux (13) à la partie supérieure du tube central (10) qui porte la selle. Un berceau  en demi-lune dit "chaise" (14), qui est venu de fonte avec des oreilles percées servant au passage des boulons de fixation du moteur, relie le pont à l'avant train. Il est boulonné sur celui-ci et sa forme peut varier selon celle du carter du moteur adopté. À l'avant de cette chaise est boulonnée une traverse cintrée (15) qui reçoit les deux tubes (16) formant les longerons de l'avant-train reliés à leur partie antérieure par une entretoise tubulaire. Ces longerons (16) sont pourvus des mains des ressorts de suspension, qui, à leur tour, sont fixés en leur milieu aux extrémités de l'essieu (21) des roues avant. Ce dernier est du type brisé, c'est-à-dire directrice et porte à chacune de ses extrémités une fourche (22) destinée à supporter la fusée articulée de la roue directrice correspondante. Ces fusées sont actionnées par un mécanisme de direction ordinaire, dont le guidon passe dans le tube antérieur (23) du cadre. La colonne de direction n'est plus verticale, comme sur le Tri-Balladeur, mais inclinée, ce qui donne au cadre central la forme d'un parallélogramme et confère au nouveau modèle (type A) un aspect plus élégant et moderne. Le tube de direction est maintenu à sa partie inférieure par un support (24) fixé sur la traverse (15) et à sa partie supérieure par deux tubes latéraux (25) attachés par leur extrémité inférieure à des bossages (26) solidaires des fixations ("mains", 19) des ressorts. Des attaches (27, 28) boulonnées sur la traverse (15) et le pont (8) servent à la fixation du moteur. Leur forme varie selon la motorisation. Sur des modèles munis d'un réducteur Bozier, l'une des attaches porte un tenon creux sur lequel s'appuie le support qui soutient la boîte de vitesses au moyen d'un palier à billes. Les photos ci-dessous montrent la fixation renforcée des moteurs des tricars de course (flèches). À droite, on voit clairement le support du réducteur.
 
 
moteur De Dion-Bouton

Le cadre qui vient d'être décrit est celui d'un tricycle de tourisme. Pour le transformer en tricycle porteur, il suffit châssis-cadre tricar, type A et Bde substituer son avant-train par un autre, représenté aux fig. 5, 6, 7. À cet effet, on déboulonne la traverse (15) du premier avant-train ce qui permet d'enlever celui-ci pour y placer le second avant-train dont la traverse (30) se boulonne à la place de la traverse (15).  Ensuite, il faut fixer l'essieu (21) directement, c'est-à-dire sans monter les ressorts de la suspension, sous les tubes latéraux (16) au moyen d'attaches spéciales (31). Pour compenser la suppression de la suspension, la traverse (30) est moins haute que la traverse (15) du premier avant-train et, en conséquence, l'essieu (21) se place à la hauteur du centre des roues. Le siège d'avant ou le coffre porteur, selon le cas, se fixe sur les tubes latéraux (16) au moyen des colliers. Si le coffre est muni des ressorts, ce sont ces derniers qui se fixent sur l'essieu.
 
Ce nouveau châssis-cadre en tubes étirés est destiné à équiper le type A, qui, en recevant un changement de vitesse Bozier l'année suivante, deviendra le type B, lui aussi un tricar léger dont le poids en ordre de marche, sans voyageurs, est d'environ 150 kg, dont 90 sur l'essieu avant, 60 sur la roue arrière. La charge utile n'est jamais indiquée, mais elle sera de l'ordre de 80 kg (valeur indiquée pour un tricar Contal). Le châssis de l'avant-train est désormais en acier profilé, solide, mais lourd, seulement celui du type B 1.1, dont le moteur n'a qu'une puissance de 3 ½ CV, est toujours tubulaire.
 
La longueur du châssis-cadre est de 1,80 m.
 
 
Austral tricar type B2
 
D'autres changements concernent le type B 2. Le tube de selle est devenu vertical au lieu d'être incliné et l'avant du châssis repose sur des ressorts de voiturette pour éviter des trépidations dans la direction.
Le poids a augmenté de 50 kg, étant d'environ 200 kg, dont 145 sur l'essieu avant, 55 sur la roue arrière (en état de marche, sans voyageurs). Il semble que ce soit la limite de poids pour ce châssis-cadre dont le point faible réside dans le fait que, dans le plan horizontal, il n'y a qu'un seul point de jonction central entre le cadre et l'avant-train, qui n'est pas encore relié à la partie arrière du cadre (châssis mono-poutre).
 
Le type H
 
Cette carence sera corrigée avec l'apparition du type H en 1907 (ci-dessous).

Austral tricar type H

On remarque les tubes élégamment arqués aux deux côtés du cadre qui, partant de l'avant-train, se prolongent vers l'arrière, où ils forment la fourche de la roue. Ces tubes sont évidemment reliés au pont du cadre au-dessous des marchepieds. Le châssis ne s'arrête plus devant le moteur situé plus bas par rapport aux modèles antérieurs, mais s'étend maintenant jusqu'à la roue arrière, ce qui augmente considérablement la rigidité de l'ensemble.
La colonne de direction est maintenant verticale et, en conséquence, le guidon devient très long, mais cette disposition permet de libérer de l'espace pour la charge en plaçant le nouveau radiateur en nid-d'abeilles entre la direction et le moteur. Le hauteur du réservoir provoque la forte courbure vers le haut du tube supérieur du cadre. Le tube central portant la selle est de nouveau incliné afin de réduire l'empattement et gagner en maniabilité. Le type H pèse également 200 kg, avec la même répartition de poids comme sur le type B 2.
 
Le tricar à transmission par cardan
 
tricar Austral à transmission par arbre

Présenté au Salon Automobile en automne 1905, cet engin très original anticipe déjà l'évolution du tricar vers une voiturette à trois roues dite tri-voiturette, bien qu'il conserve encore son cadre moto. Mais les tendances sont bien là: le désir de soustraire la mécanique aux regards en l'enfermant sous un capot, et avant tout un train d'entraînement ainsi qu'un châssis typiques d'une voiturette.
 
châssis du tricar à cardan

Ce châssis en tubes d'acier se compose de deux longerons formant un U avec la fourche et l'axe de la roue arrière. Ils sont  reliés au moyen des traverses à un faux-châssis rectangulaire recevant la mécanique. À l'avant, ils portent les mains des ressorts. Comme d'habitude, les tubes formant le châssis-cadre sont assemblés par brasure, manchonnés dans des raccords en fonte. La colonne de direction est verticale comme sur le type H. Ici, cette position est motivée apparemment par le ventilateur devant le moteur et le couvercle en tôle qui l'entoure. Malgré le guidon très allongé, la selle du conducteur est encore plus éloignée de la direction par la disposition de l'embrayage et du changement dans l'axe du véhicule, ce qui confère au tricar un aspect quelque peu démodé. Pour ne pas aggraver plus l'empattement déjà considérable, le tube central qui porte la selle, étant vertical à l'origine (au-dessus, à gauche), est devenu incliné sur la version définitive (au-dessus, à droite).  
 
 
Le type G (Série 1, 1907)
 
Avec le type G, Austral présente une véritable tri-voiturette qui en finit avec le châssis-cadre typique des tricars. Le cadre moto a cédé sa place à une "carrosserie" de voiturette ayant une colonne de direction inclinée et un volant. Même les leviers de commande de la boîte de vitesses et des freins sont ceux d'une voiture. En outre, comme beaucoup de constructeurs vers 1905, Austral abandonne le châssis en tube d'acier à raccords brasés, qui ne permet pas de grands empattements, en faveur d'un châssis en tôle d'acier emboutie système Arbel. D'un prix élevé, celui-ci combine pourtant la légèreté et la souplesse avec une grande résistance, tout en présentant une stabilité de forme des points de fixation des pièces mécaniques. N'oublions pas que le poids a encore augmenté de 50 kg, étant d'environ 250 kg, dont 100 sur l'essieu avant et 150 sur la roue arrière.
 
tricar type G
 
Le nouveau châssis n'est pas fait d'une seule tôle découpée convenablement avant l'emboutissage, mais en plusieurs parties. "Toutes les traverses sont soudées à l'autogène" (La vie automobile 1906). Pourtant, sur la version "Grande Luxe" la soudure autogène semble avoir été abandonnée: on remarque sur la photo ci-dessous les rivets au moyen desquelles les traverses ou un faux-châssis portant le moteur et la boîte, disposés sous la selle du conducteur, sont réunis aux longerons. (Sur la photo ci-dessus le longeron n'a pas de rivets).
 
Austral tricar type G
 
suspension arrière d'un tricar type G

Comme nouveauté, le châssis est suspendu non seulement en avant, par des ressorts de voiturette, mais aussi en arrière (ci-contre), au moyen des demi-ressorts à lame reliés à la fourche qui est oscillante, articulée à l'arrière du châssis proprement dit (brevet Austral non retrouvé). La raison en est sans doute la distribution inverse du poids qui pénalise la roue arrière et surtout le désir d'offrir le même confort que les concurrents, comme par exemple, le tricar Lurquin-Coudert modèle 1906, muni également d'une suspension arrière.
 



tricar Lurquin-Coudert, 1906






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